Changer, échanger, innover

Structuration des populations et interactions

Cette thématique concernent des contextes géographiques et temporels très vastes. Notre équipe poursuit des travaux concernant :

  • Les cultures néandertaliennes, au Proche-Orient et en Eurasie (entre 500 et 35 ka env. avant le présent) ;
  • Les diffusions des Hommes Anatomiquement Modernes et leurs évolutions culturelles sur le continent africain, leur diffusion en Europe de l’Ouest, et enfin leur arrivée sur le continent américain (plus tardive, mais encore mal datée et marquée par l’arrivée dans des lieux vierges de toute occupation humaine antérieure).

Ces enjeux de diffusions des Hommes Anatomiquement Modernes et d’évolution culturelle sont abordés de façon diachronique au cours du Pléistocène et de l’Holocène, en s’attachant notamment à leur éventuelle présence en synchronie avec les derniers Néandertaliens.

Notre contribution à ces recherches vise à l’établissement de cadres chronologiques affinés et renouvelés, en particulier grâce aux méthodes basées sur la luminescence des matériaux (TL, OSL, IRSL). Afin d’affiner ces cadres chronologiques, notre unité développe de nouvelles approches comme la datation de surface des roches, tout comme la datation de sédiments volcaniques (spécifiquement pour les projets développés en Afrique de l’Est). Nous développons ainsi des approches multi-méthodes (croisements entre les méthodes basées sur la luminescence, le radiocarbone, les séries de l’uranium et modélisations bayésiennes) et multi-matériaux.

En plus des résultats des méthodes de la luminescence, nos travaux sur les datations par U/Th par ablation laser vise de compléter les types d’échantillons datables par le laboratoire (dépôts carbonatés, coquilles, dents et bientôt ossements). A terme, nous espérons pouvoir proposer la datation de fossiles humains au-delà de la portée chronologique de la méthode basée sur le radiocarbone.

Sur le continent africain, les études se situent principalement sur deux zones :

La direction d’une opération de terrain en Argentine (site Cacao 1A, financée par le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères) permet de contribuer aux modèles de peuplement régionaux ou macrorégionaux. Les terrains déjà étudiés ou envisagés pour les prochaines années couvrent des environnements divers sur tout le sud du continent américain (Serra da Capivara, Brésil : collab. UMR 7041 ArScAn ; boucle du fleuve Uruguay, Brésil : collab. UMR 7194 HNHP ; Andes argentines : collab. Université de Tucuman ; rio Catalan-Chico, Uruguay : collab. UMR 8212 LSCE).

Au Proche-Orient, nos travaux sont partagés entre des gisements découverts récemment (Tinshemet, Jaljulia) et d’autres anciennement connus des préhistoriens et paléoanthropologues (Qafzeh, Hayonim, Tabun, Skhul, Misliya...) mais dont les échantillons pourront être analysés avec des approches nouvelles.

Les changements culturels (changements technologiques, manifestations symboliques, rapport aux morts...) des Néandertaliens et des Hommes Anatomiquement Modernes sur trois continents au cours de la fin du Pléistocène et de l’Holocène sont progressivement replacés dans leur cadre paléoenvironnemental et écologique, grâce à la poursuite des travaux sur les carottes marines (golfe de Gascogne, Baléares, golf du Parnaiba) et lacustres (Brésil) et la modélisation de leur chronologie (à partir des données 14C, OSL et IRSL). La construction de cadres chronostratigraphiques renouvelés doit ainsi permettre de mieux comprendre comment ces cultures paléolithiques se sont développées, à quel rythme, ainsi que la structuration spatiale des occupations et la diffusion de ces populations à différentes échelles.

A une autre échelle et pour une période différente, nos travaux concernent également la structuration des villes gauloises à l’Âge du Fer en Europe tempérée. Pour cette période sans écrit, appréhendée par la culture matérielle, la monnaie constitue un marqueur objectif précieux des identités de ces sociétés et de la façon dont elles ont interagi. La construction de larges bases de données spatialisées, et les collaborations internationales déjà établies par notre équipe permet de croiser les données sur de larges espaces, afin d’identifier les flux, les interactions, les identités et de définir les territoires qui s’y rapportent. La coïncidence - au sens temporel - entre la monétarisation de ces sociétés et l’apparition des premières villes en Europe est particulièrement étudiée. L’approche adoptée induit des collaborations entre différents spécialistes de notre unité et des collaborations plus larges (numismatique, méthodes géophysiques, études palynologiques...) afin d’appréhender ces espaces et la structuration de ces villes dans leur globalité, leur étendue ainsi que leur environnement, afin d’appréhender l’incidence de l’environnement sur l’apparition de ces villes. Plusieurs opérations archéologiques de terrain sont réalisés en Nouvelle-Aquitaine et dans le Nord de l’Espagne : la dimension transpyrénéenne est ici particulièrement importante.

Approvisionnement et circulation des matières premières

Les études sur l’économie des matières premières, en termes d’approvisionnement, de sélection, puis d’abandon constituent une part importante de nos recherches en ce qu’elles contribuent à la compréhension de l’organisation des sociétés humaines.

Au-delà des aspects purement matériels, la couleur produite est régie par des choix d’ordre esthétiques, culturels, d’approvisionnement ou de valeur. Elle porte souvent en elle des aspects symboliques forts, propres aux sociétés qui les ont utilisées ou en lien avec la représentation (iconographie). Nous poursuivons des recherches sur les pigments et colorants (minéraux et organiques) afin de contextualiser l’usage des matières colorantes par les sociétés humaines, sur des périodes allant de l’Antiquité à l’actuel. Il s’agit ainsi de mieux appréhender les aspects symboliques portés par la couleur (collaboration avec la Cité internationale de la tapisserie et le Musée de Cluny) et de mieux comprendre l’exploitation des matières premières et la circulation des ateliers, dans une géographie vaste, du Sud-Ouest de la France au Japon en passant par l’Espagne et la Sibérie.

Les stratégies d’approvisionnement en matière première argileuses, qui témoignent des mobilités des groupes et des individus mais aussi de l’évolution dans les choix et les stratégies, sont étudiées de façon diachronique dans plusieurs zones du monde, grâce à des projets déjà en cours ou des collaborations naissantes. Ces études vont par exemple de sites chalcolithiques et de l’Âge du Bronze dans le Caucase (projet 2MI, en collaboration avec l’UMR 5133 Archéorient) à des gisements de méso-Amérique et d’Amérique du Sud (Pérou) aux périodes pré-colombiennes (projet CHUPICERAM, en collaboration avec l’UMR 8096 Archéologie des Ameriques).

La circulation et l’économie des matières premières préhistoriques fait également l’objet d’études diachroniques (périodes préhistorique et protohistorique). Aux travaux déjà engagés à partir des obsidiennes, ocres, rhyolites et silex, s’ajoutent désormais des études centrées sur l’approvisionnement et la circulation des basaltes et des quartz, en relation avec l’étude des systèmes techniques. Ces questions seront traitées dans des aires géographiques diverses : zone tyrrhénienne (Sardaigne, Corse), Pyrénées, Proche-Orient, Caucase.

De nouveaux travaux sont menés sur une spécialité relativement récente au sein de notre unité, s’intéressant aux matériaux organiques. Des études sont ainsi en cours sur les denrées ayant été contenues dans des céramiques de la Protohistoire à l’Antiquité tardive, en Nouvelle-Aquitaine, en proposant une approche holistique (c’est-à-dire sans extraction préliminaire de la matière organique).

De façon transversale à toutes ces études sur l’approvisionnement et la circulation des matières premières, nous nous attacherons collectivement à aborder la question des référentiels, à travers notre approche méthodologique particulière, en analysant les géoressources disponibles, et en identifiant les facteurs présidant aux choix des matériaux dans des contextes culturels connus. L’ensemble contribuera à faire évoluer nos modèles interprétatifs en matière de stratégie d’approvisionnement en ressources (sélection, abandon...) dans un territoire donné et sera aussi à disposition de la communauté scientifique pour l’interprétation des compositions des artefacts.

Conservation, préservation et valorisation du Patrimoine et des matériaux du patrimoine

Une partie de nos études concernent également les questions de conservation et préservation des matériaux du Patrimoine. Nos travaux portent notamment sur la taphonomie des parois ornées, les matériaux textiles, et sur leurs modes d’altération (collaborations avec le Musée d’Ethnographie de l’Université de Bordeaux et la Cité internationale de la tapisserie. Le croisement des données repose sur le développement d’outils informatiques permettant l’intégration de données de natures très différentes dans des systèmes de restitution 3D, pour une interprétation à différentes échelles (artefact, monument, site). Cette approche permet de collecter des données hétérogènes et de les rendre interrogeables à travers un modèle 3D.

Publié le 18 juin 2021 , mis à jour le 6 juin 2025.